Anonyme
Retour à la normale
Sérigraphie sur papier, exemplaire non justifié - Dimension du papier : 65 x 61,5 cm - Collection de la Communauté française en dépôt au CGII - Numéro d’inventaire : OE 7916
Mai 68 ! Il y a exactement cinquante ans, un million de manifestants descendaient dans la rue pour clamer leur indignation face au gouvernement gaulliste. Le 8 mai, le mouvement d’insurrection étudiante atteint l’école des Beaux-Arts, rebaptisée « ex-école des Beaux-Arts », qui se met en grève. Soutenue par les camarades de la Jeune Peinture, la contestation s’organise. À l’entrée, les occupants écrivent : « Atelier populaire : Oui. Atelier bourgeois : Non ». Le ton est donné. Étroitement liés à l’Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes, les étudiants soutiennent les ouvriers et considèrent que la lutte contre l’université de classe doit être menée conjointement à celle de l’ensemble des travailleurs contre le système d’exploitation capitaliste.
Basé sur une action démocratique, l’Atelier est ouvert à tous. Rapidement, la décision est prise de produire des affiches. Les chants populaires accompagnent la création des projets, proposés en fin de journée en assemblées générales. Le principe de l’anonymat y est érigé en doctrine et ce, d’autant plus que beaucoup d’entre eux sont le résultat d’un travail collectif. Le 14 mai, la première affiche est tirée sur pierre (lithographie) à une trentaine d’exemplaires. Par la suite, le recours au procédé sérigraphique, d’apprentissage et d’utilisation simple, permet une production rapide et massive. Induite par le cadre strict de leur genèse, la force graphique de ces affiches est sans précédent et constitue une véritable révolution dans l’histoire de l’affiche politique. Le dessin, simple et profilé, est renforcé par l’utilisation d’aplats monochromes noirs ou d’une couleur franche.
L’affiche intitulée « Retour à la normale » est issue du désormais célèbre atelier des ex-Beaux-Arts (voir cachet). « Datée » du début du mois de juin, elle s’inscrit dans une période où le désenchantement commence à poindre. Les affiches sont, en effet, autant de réponses visuelles aux événements qui rythment l’actualité. Au total, près de six cent mille affiches furent placardées en moins de deux mois.
Ici, un troupeau de moutons est accompagné, avec ironie, de la sentence « Retour à la normale ». Créée le 9 juin 1968, cette affiche évoque ironiquement les titres de presse qui saluent le déblocage des dépôts d’essence et le retour à la normale du trafic automobile. Un appel à la vigilance est lancé…